Le pouvoir du storytelling sur la sécurité au travail
Obtenir de l'engagement collectif sur la prévention des risques est l'unique but des quarts-d'heure sécurité.
Tous ceux qui ont déjà animé ce type de réunions connaissent les difficultés de l'exercice, et parmi celles-ci, trouver un sujet dans lequel l'auditoire se reconnait, puis raconter une histoire crédible et suffisamment "adhérente" pour qu'elle s'imprime dans la mémoire des participants et crée de l'engagement.
Or, des chercheurs ont démontré que le niveau de détails augmente la crédibilité et l'adhérence des histoires qu'on raconte.
Chip et Dan Heath l'expliquent dans leur ouvrage "Ces idées qui collent" (Editions Pearson, 2018).
En 1986, deux chercheurs américains ont créé une expérience simulant un procès dans lequel les participants jouaient le rôle des jurés. Il leur était demandé d’évaluer les compétences d'une maman, Madame Johnson, et de statuer si elle devait ou non conserver la garde de son petit garçon de 7 ans. Les jurés étaient répartis en deux groupes tests, et les minutes de ce procès inventé étaient aussi équilibrées en arguments pour et contre dans les deux groupes. Seul différait le niveau de détails dans l'argumentation : dans un groupe, les arguments "pour" comportaient des détails vivants, alors que les arguments "contre" en étaient dépourvus, et dans l'autre groupe, seuls les arguments "contre" étaient ainsi détaillés.
Par exemple, un argument en faveur de la maman expliquait "Madame Johnson veille à ce que son fils se lave les dents avant de se coucher". La version vivante contenait un détail supplémentaire : "Il utilise une brosse à dents à l’effigie de Dark Vador".
Un des arguments contre était : "Le garçon est allé à l'école avec une profonde égratignure au bras, que Madame Johnson n'avait pas soignée. C'est l'infirmière de l'école qui a du nettoyer la plaie". Dans sa version vivante, l'argument précisait qu'en renversant du Mercurochrome, "l'infirmière avait fait une tâche rouge sur sa blouse".
Ces deux détails, la brosse à dents Dark Vador et la tâche de Mercurochrome, sont-ils pertinents pour évaluer les compétences de la maman ? Non, bien sûr... Et pourtant les jurés ont rendus des verdicts très différents : les arguments détaillés ont pesé bien plus lourd dans l'évaluation des jurés, car ils en ont renforcé la crédibilité. Si je peux me représenter mentalement la brosse à dents Dark Vador, il m'est plus facile de me représenter le garçon en train de se laver les dents, ce qui vient renforcer l'idée que Madame Johnson est une bonne mère.
Alors comment le storytelling peut vous aider à animer avec impact un quart-d'heure sécurité ?
D'abord trouvez vos propres sujets
Ne comptez pas exclusivement sur les documents fournis par l'équipe HSE, et encore moins sur les documents prémâchés issues de kits de communication extérieurs. En général, vous ne faites que réciter votre texte avec ce genre de documents, tout le monde s'ennuie, et résultat des courses, engagement collectif nul...
Appuyez-vous plutôt sur ce que vit votre équipe au quotidien
Un fait accidentel, un presqu'accident, un engagement pris par un membre de l'équipe lors d'une visite sécurité, le changement récent d'un process, la mise en place d'une amélioration sur le terrain, l'accueil d'un nouveau, etc... Votre actualité regorge de sujets potentiels !
Comme il s'agit de l'actualité de votre périmètre, vous serez à l'aise pour raconter un maximum de détails vivants qui rendront votre histoire crédible, et permettront à votre message de prévention de "coller" à la mémoire des participants.
Je dis bien VOTRE message de prévention.
Je reviendrai dans un autre post sur l'importance de se concentrer sur un unique message lorsqu'on anime un quart-d'heure sécurité. Mais ça, c'est une autre histoire...