Le meurtre de la jeune Kitty Genovese, à New-York en mars 1964, est devenu célèbre quand il est apparu que 38 voisins avaient été témoins de l’agression, mais qu’aucun d’entre eux n’avait appelé la police.
Il a été le point de départ de plusieurs recherches en psychologie qui ont mis à jour « l’effet du témoin », aussi connu sous le nom de « problématique du spectateur ».
Bibb Latane et John Darley, deux psychologues new-yorkais, ont en particulier mis en évidence que le principal facteur permettant de prévoir un comportement altruiste est le nombre de témoins assistant à un événement : dans un groupe, le sens des responsabilités est diffus, chacun suppose que l’autre donnera l’alerte, ou que la situation n’est pas aussi urgente qu’elle en a l’air puisque personne ne réagit.
Or, cette problématique du spectateur survient aussi en entreprise, en particulier en ce qui concerne la prévention des risques : devant une situation anormale pourtant évidente, il arrive souvent que personne ne remonte l’information. Chacun pense qu’un autre a déjà du signaler les risque, ou compte sur les collègues pour remplir le fameux formulaire de « presqu’accident ».
Voici donc 5 conseils pour rendre vos collaborateurs acteurs de la remontée d’information.
1 – Rendre la remontée d’information simple : s’il faut consacrer une demi-heure à remplir un document de 4 pages, il y a fort à parier que beaucoup laisseront ce plaisir à d’autres. La charge administrative de remontée d’information doit être très légère, et si on peut se passer de papier c’est encore mieux ! une transmission orale peut souvent faire l’affaire quand le manager sait quoi faire de l’information, et les réunions de poste sont également une bonne occasion de traiter ces sujets en live si le problème n’a pu être résolu immédiatement.
2 – Etre réactif et donner du feedback : constatez qu’aucun problème remonté n’est jamais résolu, et vous arrêterez bientôt de partager les informations. Prenez le temps d’échanger quelques mots avec la personne qui remonte une information : en plus de vous permettre de vous rendre compte par vous-même sur le terrain, ces quelques minutes bien investies montreront à votre interlocuteur que l’information est bien prise en compte et à quel point elle compte pour vous. Et n'oubliez pas de communiquer lorsque l'action est terminée !
3 – Etre transparent sur les priorités : les ressources étant limitées et les risques étant nombreux, une priorisation s’impose. Quelqu’un qui travaille tous les jours en face d’un risque identifié trouvera que la résolution de ce risque est la priorité n°1, alors qu’à l’échelle de l’atelier, elle ne l’est peut-être pas. Une priorisation insuffisamment transparente créera à moyen terme du ressentiment et l’impression que les risques ne sont pas pris en compte (et les informations cesseront alors de remonter). Rendez les critères de priorité transparents, et rebouclez sur la décision avec la personne qui a remonté l’information.
4 – Rendre la remontée d’information valorisante : le collègue qui remonte une information pourrait passer pour « le gars jamais content » qui empêche les choses de tourner rond. Au contraire ! il a su voir ce que d’autres n’ont pas vu et il a pris le temps de partager l’information pour le bien commun. Deux bonnes raisons de le remercier !
Toutes les occasions sont bonnes pour mettre à l’honneur quelqu’un quand il est à l’origine de la suppression d’un risque : pourquoi ne pas rédiger un court article dans le journal d’entreprise ou afficher un mini-reportage dans l’atelier. Au moins cet affichage-là serait lu…
5 – Faire participer à la résolution des problèmes : l’avancement du plan d’actions a pour but de rendre l’environnement plus sûr, mais aussi de développer l’enthousiasme et modifier les comportements. Une bonne solution technique n’est donc pas forcément une bonne solution. Impliquer les personnes qui remontent l’information à la résolution du problème permet une appropriation de la solution et de développer le dynamisme de la démarche.