Qu'est-ce que la culture sécurité ?

La culture sécurité est la façon dont la sécurité est perçue, valorisée, priorisée au sein de l'entreprise.

Elle est constituée de tout ce qui est observable (en particulier comment la prévention est organisée et managée) mais aussi et surtout de tout ce qui ne se voit pas : les valeurs partagées, les fiertés, les croyances au sujet des risques et de leur prise en compte, etc... bref, ce qu'il y a dans nos têtes et dans nos tripes au sujets de la sécurité.

On ne change pas une culture juste parce qu'on le décide

90% de ce que nous apprenons ne provient pas des procédures, modes opératoires et autres instructions que nous lisons à notre arrivée en fonction.

Ce que nous pensons ne provient pas non plus des valeurs affichées dans l'entreprise ou sur son site internet, ou rédigé dans la politique d'entreprise.

Ce que nous apprenons et ce que nous pensons proviennent essentiellement de ce que nous observons autour de nous, chez nos pairs et chez nos managers.

Nous apprenons d'abord par imitation, puis nous apprenons de nos échecs et de nos réussites.

Nous tirons aussi des leçons, plus inconsciemment, des conséquences immédiates de nos actions et décisions (relire notre article sur le modèle ABC) :

"Que s'est-il passé lorsque j'ai pris un raccourci avec cette règle ? Quelle permission implicite ai-je reçu quand il a fallu sauver cette commande ?"

Notre modèle de pensée, nos valeurs et nos croyances, nos craintes et nos fiertés, mettent donc des années à se modeler, et se transforment en continu par notre environnement immédiat.

Difficile de changer en 2 mois ce que chacun d'entre nous a construit en plusieurs années, voire plusieurs décennies !

Et les accidents ?

De façon plus terre à terre, même si la culture sécurité ne se mesure pas au taux de fréquence (voir notre article sur le sujet), évoquons la performance en terme de nombre d'accidents.

En France, le taux de fréquence moyen avoisine les 25 accidents avec arrêt par million d'heures travaillées. Pour une effectif de 100 personnes, ceci équivaut environ à un accident avec arrêt chaque trimestre, encore loin donc du fameux ZERO accident que tant d'entreprises affirment viser...

Qui imagine que d'un coup de baguette magique, l'entreprise va en quelques mois passer de ce chiffre a zéro ?  

Quelques pistes pour accélérer la transformation de la culture sécurité

Connaitre les leviers de motivation

Il n'y a pas que le bâton et la carotte ! La récompense et la punition peuvent avoir leur vertu, mais ils ne suffisent pas à développer une culture sécurité pérenne. Vous pouvez lire à ce sujet notre article "Trois leviers de motivation pour développer la culture sécurité".

Appliquer le modèle ABC

Le modèle Antecedents-Behavior-Consequences nous éclaire sur les comportements en mettant en évidence que nous nous comportons avant tout en fonction des conséquences perçues de nos agissements, et que les conséquences positives, immédiates et certaines sont celles qui ont le plus d'impact.

Connaitre ce modèle permet de comprendre pourquoi certaines initiatives de prévention ne fonctionnement pas, et mettre en place des habitudes managériales vertueuses. Vous pouvez lire à ce sujet notre article "Mieux comprendre les comportements avec le modèle ABC".

Travailler l'appropriation

On ne transforme pas la culture sécurité par incantations, ni en imposant une série d'outils de prévention qui ont fait leurs preuves ailleurs (voir notre article sur le sujet). Visez la qualité plutôt que la quantité. Cela semble évident ? le mille-feuilles d'outils inefficaces est pourtant un symptôme très répandu dans nos entreprises.

La qualité de l'outil est importante, mais l'appropriation de cet outil par les équipes l'est encore plus ! Et puis attention, imposer "encore" un nouvel outil, parce que nous avons "encore" eu un accident, c'est renforcer l'idée que la sécurité est une somme de contraintes qui s'accumulent en surplus de notre "vrai travail".

Tout comme on ne cuit pas plus vite un gâteau en doublant la température du four, on ne développe pas la culture sécurité en doublant le nombre d'outils sécurité.

Rechercher du feedback du terrain, écouter les signaux faibles pour mesurer l'appropriation par les équipes vous permettra de trouver le bon rythme.

Développer le leadership des managers de proximité

Les chefs d'équipes, team leaders, contremaitres, front-line managers, quel que soit le nom que vous leur donnez, sont la clé de voute de la culture sécurité.

C'est entre autres par leur enthousiasme, leur exigence, la confiance qu'ils instaurent qu'ils peuvent engager les équipes sur la sécurité au travail. A ce sujet, notre livre Libérer la sécurité au travail développe 6 compétence clés du manager pour une culture sécurité pérenne.

Bonne nouvelle, ces qualités ne sont pas innées, elles peuvent s'apprendre !

Accompagner les préventeurs

Les préventeurs aussi doivent être accompagnés. Etre un expert du droit, des normes et du document unique, c'est bien et c'est nécessaire. Mais être un "influenceur" du comportement et des valeurs, participer à transformer ce qui est perçu comme une contrainte en véritable valeur partagée, relève d'autres compétences, rarement enseignées sur les bancs de l'université.

Les préventeurs ne doivent pas seulement être accompagnés, ils doivent être soutenus : si la démarche ne repose que sur leurs épaules, ils seront perçus comme un caillou dans la chaussure des exploitants. Si au contraire la démarche est impulsée et soutenue par le Direction, il y de plus fortes chances que la sécurité soit perçue comme faisant partie de la missions des exploitants (voir la Fable du fabricant et du préventeur).

Ca prend du temps, est-ce grave docteur ?

Oui, transformer la culture sécurité prend du temps. Des années. Et ne pas voir les résultats évoluer aussi vite qu'on l'aurait souhaité peut être frustrant.

J'ai souvent observé le réflexe de se demander "comment aller plus vite" et "que faire de plus ?" plutôt que de se demander "comment faire mieux ce qu'on fait déjà" ?

Maintenez le cap !

Le zéro accident est une ambition de long terme, un horizon duquel nous souhaitons nous rapprocher, il ne doit pas être un objectif court terme oppressant et démotivant.

Bien sûr, des adaptations s'imposent parfois, mais les changement de cap récurrents n'inspirent pas confiance, au contraire.

Le chemin est aussi important que la destination.

Tant que la démarche est dynamique, qu'on parle positivement de la sécurité, qu'on apprend de nos erreurs, en développant la confiance, le leadership des managers, l'appropriation des outils sécurité, nous sommes sur le bon chemin.

Et si le zéro accident est un horizon duquel nous souhaitons nous rapprocher, ce chemin a-t-il une fin ?

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